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HISTOIRES CORSES                                                                                                                                                                NE NOUS RACONTONS PAS D'HISTOIRES

Actualités



Bibliographie

Allons plus loin déshabillons le paon pour découvrir le poulet qui est dessous. La Corse fut-elle le phare des Lumières ? Y-a-t-il eu une Corse vraiment indépendante et que voulaient les Corses sous Paoli ?


Paoli, quel père pour quelle patrie ?

 
C’est une constante dans le discours nationaliste de prendre pour leit-motiv un aller et retour incessant entre l’interprétation purement nationaliste de ce que les contemporains de Paoli appelaient "la Révolution de Corse" et l’interprétation plus spécifiquement révolutionnaire et plus ou moins marxisante. Et pourtant, nous en avons déjà eu un aperçu, la simple lecture des événements montre que loin d’être un soulèvement d’une population contre les maîtres génois et plus tard français, ce fut surtout une affaire de clans corses. Mais pour tout bon nationaliste, il importe de protéger la vierge noire de la future lutte de libération nationale (LLN pour les intimes), aussi va-t-on retenir le terme de lutte pour en inférer qu’il s’agit d’une lutte de classe, opposant tout d’abord un peuple pur et déterminé à une oligarchie dont une partie se ralliera et qui soutient Paoli comme la corde soutient le pendu. Mais ne nous y trompons pas, il ne s’agit nullement d’une lutte de classe entre un prolétariat corse et une oligarchie génoise, encore moins une lutte nationale purement anti-coloniale mais bien une lutte au sein même de la société corse, où la question génoise reste longtemps un simple enjeu tactique, et c’est en grande partie l’obstination génoise à ne pas voir les réformes nécessaires, et notamment celle consistant à faire accéder les élites corses au partage du pouvoir[1], qui finira par faire du rejet de Gênes l’élément fédérateur qu’il n’était pas au début.

 La principale caractéristique de la Révolution de Corse est la nature de la classe qui en a pris la direction, pas vraiment une bourgeoisie urbaine et commerçante comme on le verra sous la Révolution Française mais plutôt une classe composée de notables ruraux profondément terriens, un peu comme si ceux qui avaient envoyé les cahiers de doléances en 1789 avaient gardé le pouvoir, Mirabeau l’emportant sur Danton. Les nationalistes les plus avertis de l’histoire corse sentent bien le manque de sincérité de cette pseudo-lutte de libération nationale. Ils l’expliquent par le fait que celle-ci fut confisquée par cette classe possédante avec la complicité du Roi de France, évidemment, puisqu’il faut bien y voir la main de l’Etranger.

 Parmi cette classe dominante au sein de la société corse, peu avait le projet politique de l’indépendance, ou au moins de l’autonomie. Bien sûr, d’aucuns parmi nos corsistes ne manqueront pas de porter des jugements de valeur sur le manque de maturité politique chez les notables. Mais cette impuissance à s'identifier à une nation ne signifie-t-elle pas tout simplement que le concept lui-même appliqué à la Corse manque de crédibilité en raison du faible avancement de l'économie, mais plus sûrement en raison d’une image identitaire floue pour les Corses eux-mêmes. D’ailleurs, parler de Corses, à cette époque, est un abus de langage, les Limousins, les Berrichons se sentaient-ils Français à la même époque ? De la même façon, en Corse, on était d’un village ou d’une piève, et tout à la fois, d’un clan plutôt que d’un autre. Les solidarités pouvaient par le moyen de l’appartenance clanique sauter les vallées mais en aucun cas construire une identité insulaire. Enfin, l’Italie n’était nullement perçue comme étrangère, et Gênes était moins une nation occupante qu’une compagnie exploiteuse.

 Pour bien saisir le flot d’ambiguïtés que la reconstruction de cette histoire draine dans tous les esprits, corses ou non, corsistes ou non, il nous faut gratter le terrain et explorer les forces en présence, les enjeux, les racines du mythe. Nous avons déjà vu ce qu’il en était de la Révolution corse et de l’innovation institutionnelle jusqu’en 1755,  ainsi que du contenu réel de la notion d’indépendance. Il reste à explorer la période fétiche, à compter du retour de Paoli, et plus particulièrement la montée du lait de l’indépendance de 1761 à 1769, ce bref battement de cil de l’Histoire, mais aussi ce qui se passera ensuite, jusqu’à l’exil définitif de Paoli en Angleterre. Cette analyse se focalisera sur le rôle central d’un Paoli magnifique mais plus ambigu qu’on ne le croit, sur ce qu’il disait vraiment, sur ses projets, sur sa sincérité politique, puisque Babbu di a Patria, il y a.

 
Les idées de Paoli

 
C’est un événement fortuit qui amena Paoli à revenir en Corse. Jusqu’à l ‘assassinat de Gaffori en octobre 1753 et aux contrecoups de cet événement sur la situation de l’île tout au long de l’année 1754, il était surtout fils de Hyacinthe et fortement engagé dans une carrière militaire, à Naples, où il devint officier dans le Régiment Corsica à la sortie de l’Académie Royale Militaire d’artillerie à la fin de l’année 1749. Il envisagea même, un temps, entrer au service de la France en sollicitant une recommandation auprès du maréchal de Cursay. Sa carrière se poursuit de poste en poste, au sein du Real Farnese. Sans doute, ne se désintéresse-t-il pas totalement des affaires corses, son dernier poste à Porto Longone (île d’Elbe) le rapproche[2], il a des échanges épistolaires avec son père où son envie de revenir contraste avec la résignation de Hyacinthe Paoli. Il semble se documenter sur l’administration, l’art du gouvernement, l’économie politique, les réflexions historiques et institutionnelles d’un Montesquieu. Bref, une année après l’assassinat de Gaffori, Paoli pense que le temps est venu, compte tenu du vide politique qui se présente devant lui. Ce faisant il prépare son débarquement dès septembre 1754, en faisant savoir que sa venue dans l’île répondrait à un vœu de ses compatriotes, qui lui envoient des lettres le pressant de prendre la succession de son père.

 Paoli ne débarque pas les mains vides, ce 29 avril 1755, près de Poretta, à l’embouchure du Golo ; il a dans sa musette un projet de constitution provisoire qui n’apporte d’ailleurs pas grand’chose de plus, mais a pour but essentiel de mettre son texte et donc lui-même au centre des discussions de la consulte de Caccia qui se tient quelques jours avant son arrivée. Cependant cette première consulte d’inspiration paoliste est très disputée, le clan Matra faisant barrage. Paoli n’a pu débarquer en général de la Nation, il lui faudra attendre la consulte de Casabianca, quelques mois plus tard, en juillet, où il sera élu avec une marge très faible. Notons que ces consultes ne représentent véritablement que l’en-deçà des monts. Néanmoins, voici notre héros muni des pleins pouvoirs militaires et civils, mais non pas constitutionnels comme on le croit souvent, tandis que sa marge de manœuvre diplomatique est limitée, d’autant que son élection n’a été rendue possible qu’avec l’appui d’un autre clan représenté par Ignace Venturini, avec lequel il partage le pouvoir exécutif.

 A ce stade, peut-on dire que Paoli est un homme neuf ? Il est parti en exil à l’âge de quatorze ans avec son père, et il n’est connu que de nom. On ne peut qu’être étonné de ce retour soudain et victorieux, malgré de fortes oppositions et l’absence quasi totale de légitimité dans l’au-delà des monts. Ou pour dire les choses brutalement, comment un aventurier a-t-il pu être porté à la tête de la révolte en quelques mois ? Le précédent de Théodore peut nous éclairer dans la mesure où l’on tient pour certain et constant que les Corses sont prêts à suivre n’importe quelle figure pourvu qu’elle apporte considération, argent ou troupes. Mais Paoli ne semblait traîner avec lui que la réputation de son père. L’explication peut être trouvée dans deux directions. Tout d’abord, les clans qui cherchaient un protectorat qui les détachât définitivement de Gênes, pour cette raison, se sont opposés à Matra, qui, lui, recherchait un accord avec la République. Ils leur fallait trouver un porte-drapeau qui parle au cœur des Corses, et qui ait été, précisément, éloigné un temps des querelles et des inimitiés.

 L’autre explication est plus aventureuse, mais elle ne doit pas être écartée sans examen. On sait déjà que Paoli fut reçu dans la loge de rite écossais dite des Neuf Muses, le 15 juin 1778. Cette loge est liée à la dynastie des Stuart et il a rejoint la loge du Prince de Galles, deux ans plus tard. Certains auteurs se sont interrogés sur une initiation maçonnique plus précoce pendant son séjour napolitain, initiation qui aurait pu lui permettre de disposer de documentations, d’appuis divers et, tout bonnement, d’un réseau d’affiliés corses de même obédience.

 Plus attestée, l’influence de Machiavel a inspiré les idées de Paoli, au moins dans la démarche qu’il convient d’avoir lorsqu’il s’agit de faire accoucher une Nation, là où n’existent, et depuis toujours, que des intérêts particuliers. En 1755, Paoli a mis en pratique les préceptes de Machiavel pour faire céder les pouvoirs et les solidarités locales et y implanter un véritable courant paoliste. L’articulation de mesures de lutte contre les vendette par une justice impitoyable avec des mesures de reconnaissance des mérites, de récompenses pour s’attacher des fidélités concourt à installer petit à petit une dimension nationale. Néanmoins, les résistances furent si nombreuses que ce projet d’un homme qui allait contre les pratiques et les solidarités séculaires fut perçu comme le projet d’une ambition personnelle.

 
Les clans pour ou contre le projet paoliste

 
La consulte de Corte de novembre est communément assimilée à la toute première constituante moderne malgré l’existence de précédents dans la séparation des pouvoirs, comme en Suède ou en Angleterre. Le système constitutionnel qui fut adopté consacre le peuple corse comme souverain exerçant son autorité par le moyen d’organes d’Etat, indépendants et équilibrés jusqu’à un certain point. En effet, deux aspects montrent le caractère inachevé de l’œuvre : la non séparation du pouvoir exécutif et du pouvoir judiciaire, le caractère mixte de l’assemblée (la Diète) comprenant à la fois des représentants élus et des représentants invités… par Paoli.

 Le caractère démocratique de la Diète a vite connu des limites dues à l’exercice d’un pouvoir personnel de Paoli, qui s’explique par le jeu complexe des solidarités et des inimitiés claniques. Paoli a, ainsi, accordé une représentation privilégiée à certains affidés non élus, et, un peu plus tard, au clergé qui lui était en général favorable. La pression de Paoli s’accentua les années passant, obtenant au passage un droit de veto suspensif (mais non définitif, contrairement à ce qu’il avait demandé) à l’encontre des lois votées par la Diète. Ne nous trompons pas, la Diète était essentiellement composées de notables, les « principali », tandis que l’électorat lui-même était dans sa quasi-totalité composé des personnes les plus considérables de l’île. Ce n’est donc pas une assemblée démocratique dans le sens moderne du terme, une assemblée représentant le peuple tout entier. Cependant, c’est tout de même une assemblée où pouvait s’exprimer les alliés comme les adversaires les plus résolus de Paoli ; en outre, la capacité de manœuvre militaire et administrative de l’exécutif devait pouvoir être préservée et renforcée tout simplement parce que le gouvernement ne contrôlait pas toute l’île, loin de là. On l’a vu, les Présides demeuraient à Gênes, l’au-delà des Monts n’était pas acquis à la Révolution de Corse et plusieurs pièves du Deçà non plus.

 Dès l’installation de Paoli, la guerre des clans s’engage avec une attribution dissidente du généralat à Marie Emmanuel Matra à Alisgiani où le clan Santucci a rallié à Matra d’autres familles au motif des actions anti-vendetta de la commission ambulante de pacification, la Marcie,  mise sur pied par Paoli en août 1755 et qui a prononcé des condamnations à mort immédiatement exécutées en vertu de la confusion des pouvoirs judiciaire et exécutif. Commence alors durant tout l’été une véritable guerre des montagnes entre les paolistes et les matristes qui ne prend provisoirement fin qu’avec le départ de Matra, lâché par les Génois. En cette fin d’année 1755, Paoli qui ne contrôle vraiment que le Rustinu, une partie de la Castagniccia et Corte, se heurte aux places fortes génoises et au commissaire génois Grimaldi qui le bat en décembre, tandis que les régions hésitantes du Cap Corse ne basculent pas de son côté. Pour étendre et conforter le pouvoir de son gouvernement de fait, Paoli envoie des émissaires à Naples pour solliciter des secours auprès de l’ambassadeur d’Angleterre, ainsi qu’auprès du Pape en demandant qu’un visiteur apostolique soit désigné pour contrebalancer l’hostilité déclarée des trois évêques du Deçà à la convocation de la consulte des ecclésiastiques au couvent de Casinca. Malheureusement Rome donne raison aux évêques dans leur interdiction de participer à l’assemblée ecclésiastique dont une grande partie est en faveur des menées paolistes. A ce moment, il devient nécessaire pour le mouvement insurrectionnel de ne pas se laisser étouffer dans la rive droite du Golo, aussi Paoli décide-t-il, en mars 1756, de se rendre dans l’au-delà des monts où tout reste à faire, les pièves y étant neutres ou pro-génoises, d’autant que le commissaire génois du Delà a pris les devants en demandant aux communautés de rester fidèles et de ne pas recevoir Paoli, sauf à être considérées comme rebelles. La tournée de Paoli est un succès partiel, deux pièves refusant son autorité, la Rocca et l’Istria, sans compter la Préside d’Ajaccio où réside le commissaire génois.

 Pendant ses premières années d’action politique, Paoli va heurter les intérêts et les ambitions et plus encore les haines de famille. La rivalité entre les personnes et entre les clans bat son plein et cette caractéristique de la vie politique corse ne disparaîtra jamais totalement ; elle explique une grande partie des événements politiques jusqu’à l’annexion et au-delà, pendant la période révolutionnaire.

 Avec le retour de Matra en janvier 1757, le conflit matriste reprend et Paoli lui-même se trouve en difficulté dans le Bozio ; Dans l’attaque du couvent où il s’était réfugié, Matra trouve la mort mais son cousin germain poursuit la lutte et soulève les pièves qui entourent Corte vers laquelle il se dirige désormais, avant d’être arrêté à Pedicorti et de se réfugier à Gênes. Le péril matriste étant écarté, Paoli ne peut pourtant pas étendre son autorité sans accepter de partager le pouvoir en direction du Delà, qui cherche une autonomie dans le gouvernement national. En Septembre, le parti français du Delà tient deux consultes, une au couvent d’Olmeto, pour l’Ornano, l’Istria, le Talavo et La Rocca, l’autre, en Octobre, au couvent de Mezzana, pour la Cinarca et Vico, où il est question de la souveraineté des provinces du Sud. A ces deux occasions, les Génois et les Nationaux (paolistes) sont renvoyés dos à dos. Ainsi Antoine Colonna se fait élire général par la consulte du couvent d’Olmetto en septembre 1757, par des pièves du Delà, dont certaines avaient clairement refusé à Paoli l’entrée de leur territoire l’année d’avant, et dont une grande partie continuera de refuser son autorité lorsqu’à la demande de Colonna, Paoli effectue une nouvelle tournée dans le Delà, déjà très travaillé par le parti pro-Français[3].

 Sont en place plusieurs groupements d’intérêts, en contradiction plus ou moins marquée avec les orientations des Nationaux. En opposition claire et résolue, les évêques et les partis matristes et génois du delà des monts formeront une partie de l’appui du parti français, une fois l’annexion acquise. En relation avec les paolistes, le Delà « autonomiste » de Colonna est fortement lié au parti français mais aussi au parti maltais qui garde encore quelques soutiens. Côté clergé, Paoli va mener une lutte ferme contre les évêques et obtient l’envoi d’un visiteur apostolique à qui il remet les revenus ecclésiastiques des pièves curales[4] qu’il contrôle. Le parti matriste va se maintenir et mener une guerre d’escarmouches continuelles contre les Nationaux jusqu’en 1763, date de l’embarquement pour l’exil de François Matra. Avec l’annexion par la France, les clans pro-génois fusionnent avec le parti Français qui attire à lui la plupart des grandes familles corses, qui obtiennent reconnaissances, titres et positions de la part du Roi. Le rapport de force devient trop défavorable et Paoli doit s’exiler une nouvelle fois, la plupart des Corses ayant accepté bon gré mal gré la souveraineté française. Avec la Révolution Française, le schéma des alliances change. Tout d’abord Paoli, apprenant le vote de la Constituante annexant définitivement la Corse (et donc mettant fin aux rumeurs d’un retour de l’île à Gênes), reprend l’idée du protectorat qu’il avait esquissée quelques années auparavant, et envisage dès lors son retour dans le flot du retour des exilés, retour autorisé par la Constituante. Cependant l’idylle avec le pouvoir révolutionnaire va tourner court, en raison d’un désaccord profond sur le degré d’autonomie de la Corse, refusé par la Convention fidèle à sa conception jacobine de l’Etat, et Paoli finit par se trouver qualifié de traître à la république par un décret en date du 17 juillet 1793. A cette date, les paolistes tiennent la montagne mais le littoral est acquis à la république française. L’emprise géographique des pièves contrôlées par Paoli ressemble à celui prévalant au début de la révolte corse contre la République de Gênes. Une dernière carte va être jouée, celle de l’Angleterre, mais l’aventure durera un peu plus de deux ans, de juin 1794 à novembre 1796, tandis que Paoli lui-même est écarté par les Anglais et, dès octobre 1795 doit partir pour Londres. La période du royaume anglo-corse fut elle aussi marquée par des luttes de clans, d’une part Paoli qui exploite certains troubles anti-fiscaux (décidément !) pour essayer de revenir au pouvoir, d’autre part certains anciens paolistes[5] ou du parti Français qui refusent la mainmise anglaise sur l’île. Cette instabilité chronique va contribuer à permettre l’infiltration de Corses venant de l’armée d’Italie ou de France, et préparer la reprise de l’île sous l’impulsion de Bonaparte.

 
Les vrais enjeux ou les intérêts bien compris

 
Au-delà des conflits de personnes, les révoltes de Corse ont mis en exergue les lignes de fracture qui ont, de tout temps, traversé la société insulaire. Lorsque des individus ou des groupes ont semblé changer d’étiquette, s’ils ont pu paraître traître au projet premier qui les animait, ils sont, en réalité, restés souvent fidèles aux intérêts du groupe ; c’est pourquoi on a pu voir des pro-génois et des nationaux se retrouver côte à côte dans le ralliement au pouvoir français, d’autres parmi les nationaux se séparer en optant pour la République, pour la contre-révolution ou pour le protectorat anglais.

 Dans une première approche, il est tentant d’opposer le Deçà et le Delà, d’autant qu’on a pu constater la permanence des manifestations d’autonomie du Delà par rapport au Deçà pendant cette fameuse « guerre de quarante ans », positionnement politique qui recouvre l’ancienne opposition entre la terre des seigneurs et la terre des communs depuis la révolte de Sambucucciu d’Alendu[6]. Si l’on s’en tient là, le trait reste par trop grossier. En effet, dans le Deçà, il faut tenir compte du Cap Corse hésitant, d’une Balagne partagée avec Calvi pro-génoise, en bref d’une rive gauche du Golo pas nécessairement acquise à la cause nationale face à une rive droite plus déterminée ; enfin, dans le Delà, les pièves développent une politique fortement centrée sur leurs intérêts immédiats, l’accueil réservé à Paoli restant très contrasté sans compter les présides génoises. Pour terminer, si les analyses qui peuvent être développées selon un critère historique et/ou géographique ont leur intérêt, les lignes de forces touchent surtout les structures sociales, les groupes familiaux ou les clans. Les familles qui dominent certaines pièves ont un rôle déterminant et, qui plus est, n’est pas nouveau ; toute l’histoire de la Corse est traversée depuis les temps les plus reculés par des guerres intestines privées où l’aide militaire de l’autorité « extérieure » est sollicitée que ce soit Pise en son temps, la Papauté, Gênes ou ses sociétés d’affermage comme la Maona au XIVè siècle ou l’office de Saint Georges en 1453.

 A l’époque qui nous intéresse, celle de l’action de Paoli, la famille Matra au Nord et la famille Colonna au Sud développent des stratégies qui leur sont propres. Le cas du clan Matra illustre bien la confusion entre intérêts particuliers et engagement politique qui relève parfois de l’affichage grandiloquent. Cette famille des anciens caporaux de Moïta [7] s’était illustrée dans toutes les querelles de seigneurs et avait joué un jeu systématique de balancier entre les intérêts du roi d’Aragon, ceux de Gênes, voire même de l’Eglise, après la guerre de Cinarca, au milieu du XVè siècle.  On retrouve cette famille réconciliée avec Gênes dans les deux siècles qui suivent, ce qui leur permet de s’installer à Aleria. Enfin, la trajectoire ascendante du clan trouve sa consécration au XVIIIè siècle, avec l’anoblissement et une augmentation sensible du patrimoine foncier, à la faveur des évolutions du droit génois. A la veille de la révolte corse, son emprise est considérable, soit directement dans les pièves du centre-est au niveau d’Aleria, soit par les alliances qu’ils ont su nouer vers le Nord (Bastia, le Nebbio, le Cap) ou vers le centre (Corte, Bozio).

 Marie Emmanuel de Matra, « général de la nation corse » profite des événements pour avancer ses ambitions au sein du pouvoir exécutif qui se construit autour du roi Théodore et finalement pour asseoir la prééminence de sa famille dans la rive gauche du Golo, une fois l’épisode Théodore oublié. L’extension de son influence est impressionnante et les pièves de Serra, de Verde, d’Alisgiani, de Rogna, de Castellu, du Fiumorbu, de Casinca, de Corti, et du Nebbiu, sont favorables à sa candidature comme chef de la nation corse en avril 1754, ses partisans allant jusqu’à convoquer une Cunsulte dissidente qui échouera. Dès lors, la haine anti-paoliste sera inextinguible et passera dans le clan matriste tout entier, le poussant à nouveau dans les bras génois. La rupture du clan matriste d’avec les nationaux sera d’ailleurs rendue plus manifeste encore par les déclarations du frère de Marie-Emmanuel, François, qui dès 1762, est armé par les Génois et débarque à Bastia en se présentant comme le libérateur des Corses contre la tyrannie… des Nationaux. Il serait tout aussi instructif d’examiner les jeux de pouvoirs et les ambitions foncières des chefs nationali de premier plan, les Gaffori, Venturini, Rivarola. Plus que le Delà, le Deçà est une terre d’intérêts fortement imbriqués et opposés où les autorités génoises puis françaises auront beau jeu de se trouver des alliés parmi leurs ennemis de la veille. Il y a là un très joli terrain de recherche pour peu que l’on soit prêt à mettre de côté le mythe de la guerre de libération.

 Je ne résiste pas à la tentation d’évoquer les luttes de clans dans le Delà, en l’espèce les aventures de la famille Colonna et ses alliés dont l’engagement pro-français a surtout pour but de garantir l’autonomie du Delà, souci qu’ils avaient déjà montré vis-à-vis de Paoli. Cette famille avait réparti ses alliances et si Bianca Colonna œuvrait pour le royaume de France depuis longtemps, son frère, Antoine, avait développé des relations avec l’Ordre de Malte tout en ménageant les alliances françaises. En septembre 1757, on l’a vu, il se fait élire Général lors d’une consulte réduite aux pièves qu’il peut contrôler. Le mois suivant, il réussit à élargir son audience lors d’une seconde consulte mais il a l’habileté de ne pas se poser en adversaire de Paoli mais plutôt en relais obligé pour le sud de l’île. C’est dans cet esprit qu’il accompagne Paoli dans presque toutes les pièves sous son contrôle, sauf la Rocca, définitivement hostile à Paoli. Cette manœuvre lui rallie les paolistes comme les anti-paolistes du Delà en août 1758 à la seconde consulte de Mezzana, aux portes de la Préside d’Ajaccio, tenue par les Génois. Cependant ses contacts avec les Français demeurent intenses pour afficher son basculement définitif en faveur du parti de la France en septembre 1761, ce qui lui fait perdre le pouvoir, face à une coalition pour le moins bizarre et pas très naziunalistiquement correcte qui regroupe les paolistes et… les partisans de la République de Gênes ! Fermez le ban ! Bien sûr, il s’agit d’une famille qui s’agite dans le Delà, mais qu’on ne s’y arrête pas : le Delà des Monts, terre des seigneurs et de la propriété foncière, a toujours eu un comportement très différent du Deçà, tout au long de l’histoire corse, en sachant se contenter d’un rôle de seigneurie des marches que ce soit au profit de la république de Gênes, de la France, de Malte ou du Grand Turc ![8]

 Pour en terminer avec ce bref portrait des intérêts en jeu et des composantes de la société corse, il nous faut souligner le poids spécifique de la question ecclésiastique. Les évêques presque toujours non corses sont traditionnellement fidèles à Gênes et l’épisode des évêques corses en 1741 ne change pas vraiment la donne, trois d’entre eux étant totalement inféodés ; en cela, ils se distinguent d’un clergé insulaire rétif et proche de ses ouailles et de leurs humeurs. En plus des évêques (il y a cinq diocèses dans l’île, à cette époque), Gênes nomme aussi les Provinciaux des Ordres, les Vicaires Généraux et les Supérieurs Réguliers. L’une des premières conséquences de la révolte fut de réactiver le souvenir des droits du Saint-Siège [9] sans succès. Le clergé corse participe volontiers aux Consultes ecclésiastiques de la Nation et va jusqu’à déclarer juste et licite la lutte contre les Génois ; il a aussi participé aux opérations militaires comme le curé de Zevaco pendant la royauté de Théodore. Plus tard, Paoli, en demandant l’arbitrage de la papauté sur la nomination du vicaire apostolique d’Aleria [10], va réitérer la manœuvre d’une souveraineté nominale du Saint-Siège, ce qui vaudrait reconnaissance de fait d’une république corse, alors même qu’aucun pays européen ne s’y décide malgré les protestations de sympathies entendues ici ou là. Si l’aventure tourna court, ce n’est pas faute d’un engagement résolu du clergé corse en faveur de l’indépendance (et sans doute était-il plus indépendantiste que beaucoup de Nationaux) mais plus simplement d’une insuffisante détermination du Saint-Siège alors même que la froide détermination de Choiseul montait en puissance.

 
Ceux du parti français

 
Ils regroupent les Corses qui, très tôt, parfois dès le début, n’ont jamais considéré comme probable ni même souhaitable une indépendance réelle de la Corse. D’une certaine manière ce qui distingue ce camp des paolistes est tout simplement d’avoir affirmé avec force deux choses : il faut un protectorat fort, et il faut que le rattachement se fasse auprès du royaume le plus puissant sur le Continent. Là où Paoli naviguera de façon incessante entre l’idée d’indépendance et l’idée de vassalité lointaine, au bénéfice de la France comme à celui de l’Angleterre, le camp pro-français a choisi. Plusieurs figures joueront un rôle important par la suite, mais laissons de côté les Bonaparte et autres Saliceti. Attachons-nous plutôt à deux personnages plus en retrait mais tout aussi importants au moment de la formation du parti pro-français ou au moment de l’annexion. Rafaelle de Casabianca, tout d’abord, qui finira Pair de France, est le représentant du parti pro-Français dans le Deçà, où dès avant Ponte Novo il lance des réseaux d’influence. Il commence comme capitaine au Régiment Buttafuoco en 1770. Il mène une répression sans mesure dans le Fium’Orbo en 1774, mais cela ne l’empêche nullement d’être désigné par les communautés du Deçà pour solliciter le retour de Paoli, qu’il accompagne en avril à Paris. Après un rôle peu glorieux lors de l’affaire de l’expédition de Sardaigne [11], où il remplace Paoli, il est arrêté par les partisans de ce dernier puis relevé de ses fonctions par les Français pour calmer le jeu. Il résiste aux Anglais et aux paolistes devant Calvi, avant de se rendre et de continuer sa carrière auprès de Bonaparte, dans l’armée d’Italie. C’est en tant que préfet du Liamone, à Ajaccio qu’il transmet un rapport dénonçant les agissements du Général Morand, ce qui contribue à la révocation de ce dernier. En bref, voilà un personnage qui a pris définitivement fait et cause pour la France mais qui sait aussi dénoncer les agissements qui vont trop loin même si lui-même avait pu se montrer sans concession avec ses compatriotes.

 Le personnage de Mathieu de Buttafuoco est encore plus étonnant et plus ambigu puisqu’il sera transfuge d’un camp vers l’autre. Après un début de carrière dans le Royal Corse, en 1755, il est à la tête du parti pro-français, dans la Delà, mais à ce moment il n’a pas encore opté pour le rattachement. S’il ne s’engage pas militairement au côté de Paoli, en 1764, il contacte cependant Jean-Jacques Rousseau, afin d’obtenir un plan institutionnel pour la Corse. Après quelques échanges dont la réalité sera mise en doute et provoquera les railleries de Voltaire à l’endroit de Jean-Jacques Rousseau, le projet tourne court, le texte étant aux antipodes de celui de Paoli. Sa promotion comme colonel commandant le Royal corse le pose en intermédiaire entre Choiseul et Paoli. Dans ce rôle il défend encore une position indépendantiste. Devant les positions raides de Choiseul, Paoli le relève de sa mission. En mai 1768, après qu’il eut informé Paoli de la signature du Traité de Versailles, ce dernier le soupçonne de traîtrise. Et le soupçon fit le traître. Dès lors tout s’enchaîne très vite ; en septembre, il ouvre la Casinca aux Français, puis il demande des secours financiers à Choiseul pour défendre le parti Français contre les paolistes, secours qui lui seront accordés. En 1769, le Régiment Royal Corse qu’il commande devient sa propriété. Il est nommé général de brigade puis maréchal de camp et créé comte en 1781. Il est élu député de la Noblesse  pour aller siéger aux Etats Généraux de Versailles. Il essaie d’organiser la contre-révolution en Corse. A compter d’octobre 1790, date de sa dénonciation de Paoli à la Constituante comme agent de l’Angleterre et saboteur, il développe un anti-paolisme virulent. Accusé de royalisme, il finit par émigrer, et après un bref ralliement au paolisme pendant l’épisode anglo-corse par nécessité, il revient d’exil en 1800 pour mourir en 1806 à Bastia, sans avoir plus marqué son passage sur terre. Dans cette trajectoire, comment ne pas y voir non pas un attachement à la France (bien hors de propos à cette époque) mais plutôt un attachement à sa classe sociale. Pendant des paolistes de rencontre, il est un peu un pro-Français de rencontre.

 Au-delà de ces exemples, la présence des Corses dans un camp puis dans un autre, avec de nombreux allers et retours est un trait caractéristique de l’histoire de la Corse pendant les troubles révolutionnaires. Des officiers et soldats corses servent les Bourbons de Naples après avoir soutenu le Royaume Anglo-Corse et quitté la Corse à sa chute. Les officiers sont issus des rangs des notables qui avaient auparavant rallié les Français et lutté contre les paolistes. Emigrés, on les retrouve « réconciliés » avec Paoli à la manière d’un Buttafuoco. Du côté des révolutionnaires, les Corses sont également nombreux, dans l’armée d’Italie, comme lors de la reconquête de Naples en 1806, ou le contrôle de la Sicile. Ils effectuent souvent de nombreux allers et retours, eux-aussi : soutien à Paoli jusqu’à Ponte Novo, puis ralliement au parti français par intérêt, puis soutien à nouveau à Paoli  en 1789, mais refus du protectorat anglais toujours par intérêt.

 
Ce que Paoli a compris, n’a pas compris, a accepté, n’a pas accepté

 
Paoli au lendemain de Ponte Novo est bien seul. Dire que les notables l’ont trahi par le ralliement tandis que le peuple restait fidèle à l’idéal national paolinien, c’est tenir pour acquis que le peuple corse se pensait lui-même comme peuple et nation, ce qui est loin d’être démontré, l’inverse, on l’a vu, est plus vraisemblable. Cependant il n’est pas douteux que les divergences d’intérêts parmi les notables et les chefs militaires ont pesé aussi lourd dans la défaite que la puissance militaire française. Paoli en était d’ailleurs parfaitement conscient.

 

Après un exil de vingt années, en Angleterre, Paoli perd le contact avec la réalité corse et surtout la montée en puissance du parti français. Il connaît bien sûr les ralliements mais il sous-estime la profondeur des imbrications entre les intérêts des notables et les carrières et situations offertes par le Royaume de France. Cette sous-estimation n’a pas d’effet immédiat lorsque Paoli accueille la Révolution Française comme une occasion pour la Corse de se libérer sous un protectorat bienveillant. Mais il perçoit assez rapidement l’incompatibilité entre le jacobinisme et ses propres vues ; c’est alors qu’il pourra voir combien le soutien des Corses lui sera mesuré. Pour lors, il est fêté, encensé, dorloté mais trompé (ou se trompe-t-il lui-même). Il n’a pas que des amis, et dès 1790, les rumeurs se répandent en Corse sur ses accointances avec l’Angleterre et ses loges maçonniques. L’île connaît des mouvements contre-révolutionnaires qui sont le signe évident des profondes divisions d’une société corse, éclatée comme elle ne le fut jamais. Paoli prend enfin conscience du fossé qui le sépare des jacobins et des conséquences de la Terreur dans l’île même. Il comprend enfin le véritable caractère centralisateur et égalisateur (au rasoir républicain, si besoin) du pouvoir Conventionnel.

Mais c’est la Convention qui déclare Paoli hors-la-loi et ce sont des Corses hostiles qui poussent la Convention, ce n’est pas Paoli qui rompt. Dès lors Paoli fait appel aux Anglais, justifiant ainsi, à son corps défendant, les accusations dont il faisait l’objet. Mais là encore, il s’illusionne, le protectorat anglais  se révèle aussi peu respectueux des libertés corses telles que Paoli les conçoit.

 

Parti pour son troisième et dernier exil, il observe l’ascension fulgurante du futur empereur, mais, malgré la rupture avec les Bonaparte, qui comptent au nombre de ses accusateurs auprès de la Convention, il semble se résoudre à envisager une conquête des libertés par l’entrée dans la carrière, afin que les Corses puissent, individuellement, vivre libres sous souveraineté française. On oublie trop que Paoli, bien que déterminé à chercher le Peuple corse, à construire la Nation corse, ne le trouvant pas, ne pouvant la bâtir, reste un pragmatique qui ne confond pas idéologie et sincérité, ni liberté des individus et indépendance.

La construction du mythe comme alternative au ralliement napoléonien

 
Pour les corsistes, le ralliement napoléonien opère comme le péché originel. Comment, en effet,  se détacher de la patrie française alors que les Corses ont prospéré sous souveraineté française, ont manifesté leur attachement aux heures les plus sombres, ont porté le drapeau français dans les plus lointaines colonies ? Comment faire si ce n’est en arguant d’un gigantesque malentendu de deux siècles ? Comment effacer Napoléon, ou mieux, pour les plus avertis, Napoléon III ? Il faut pour cela magnifier un autre héros. Un héros de la Nation corse, de l’indépendance corse, et ce héros c’est Paoli. Au besoin, on fera subir au personnage quelques modifications de silhouette. On substitue au pragmatique l’idéologue, on efface les revirements du personnage, on gomme la reconnaissance de la souveraineté française révolutionnaire, on ignore la recherche permanente d’un régime de protectorat, pour au final, inventer un champion de l’indépendance là où l’analyse historique sereine révèle un défenseur de la liberté, et, plus encore, de la liberté individuelle, bien éloigné de l’idée d’un sacrifice du bonheur au moloch de la Nation. L’aventure paoline fut celle d’un homme des Lumières pétri des libertés anglaises et décidé à éprouver ses idées en les confrontant à la réalité en cherchant à créer un Etat dans le pays de ses pères. En somme, il s’est trouvé une patrie mais sans que cela infère qu’un peuple unanime se soit trouvé un père ; loin d’être une Nation à la recherche d’un Etat, la Corse sous la direction de Paoli fut voulue par lui plutôt que lui par elle.




[1] La nomination d’un évêque corse avait déchaîné des transports de joie tant les Corses étaient  peu habitués à voir l’un des leurs obtenir des postes élevés au sein de la République de Gênes. Il a sans doute manqué un Doge corse ! Cette vision courte, la France ne l’aura pas, en proposant immédiatement aux élites corses une entrée dans la noblesse française, des titulatures épiscopales ou militaires, des postes dans l’administration royale.

[2] Il y contactera l’abbé Zerbi, partisan du rattachement à Malte, qu’il essaiera de dissuader en avançant des arguments empreints de toute la fierté du Corse s’offusquant d’un tel rattachement qui reviendrait à échanger un maître prestigieux (Gênes) contre une petite île misérable, et aussi peut-être parce que cela reviendrait à donner la Corse à l’ordre des Hostpitaliers.

[3] La sœur d’Antoine Colonna entretenait déjà des contacts avec les Français, dès 1735. En 1739, elle propose aux Français de faire lever un régiment de soldats corses au service du Roi de France. En 1748, elle participe à l’action des pro-Français. En 1755, elle est à la tête du parti pro-français, dans le Delà.

[4] Les pièves curales ou ecclésiastiques n’ont pas nécessairement la même emprise territoriale que les pièves civiles.

[5] Comme les Bonelli engagés dans la révolte de Bocognano en 1795-1796

[6] En 1358, les paysans du nord de l’île se révoltent contre les seigneurs en rompant ainsi le lien féodal, le tout avec l’appui de Gênes. C’est à cette occasion qu’est entrepris la réorganisation administrative de l’île avec la création de 66 pièves. Dans le sud de l’île, l’organisation féodale demeure intacte et échappe au pouvoir des caporali.

[7] Pièves de Serra, juridiction d’Aleria

[8] En juin 1743, un aventurier dont il est difficile de connaître les lettres de créance, Humbert de  Beaujeu, recherche l’appui des Turcs en échange de la citadelle de Bonifacio. D'autres traités sont prévus entre les régences d'Alger, Tunis et Tripoli. Plus de vingt ans plus tard, Paoli explore à son tour cette possibilité d’alliance avec les Régences turques de Tunis et d’Alger, devant les dangers croissant d’une annexion

[9] La suzeraineté féodale du Saint-Siège durera jusqu’en 1077 ; à cette date Grégoire VII confie la Corse à Pise sans céder formellement son droit de suzerain.

[10] La nomination de Don Gnaziu Felce par le Chapitre de Campulori en 1759 va constituer le point de départ d’un conflit avec de Angelis évêque en titre réfugié à Bastia qui avait nommé un autre vicaire. Don Gnaziu Felce et le chanoine Orsatoni vont se rendre à Rome pour appuyer la demande d’arbitrage du Pape Clément XIII qui traînera en longueur sans conclusion décisive.

[11] Voir chapitre suivant. Après l’échec de Cagliari, il succède à Paoli écarté comme responsable de l’échec définitif de l’expédition de Sardaigne en 1793.


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C’est une histoire de mythes et d’identité : la question corse qui fait souvent l’actualité
a tordu la mémoire des faits. Le tout grâce à la
réécriture de l’Histoire de l’île et à la mythologisation de la langue


Allons plus loin déshabillons le paon pour découvrir le poulet qui est dessous. La Corse fut-elle le phare des Lumières ? Y-a-t-il eu une Corse vraiment indépendante et que voulaient les Corses sous Paoli ?


La Corse s’est ralliée. A-t-elle combattu ? La Corse eut-elle un comportement si différent des autres provinces de la République française ? Le ralliement fut-il facile ? A-t-elle cru se découvrir un destin ?


La petite île a-t-elle voulu donner des gages ? S'est-elle imaginé un Empire par
procuration ? Lors de l'occup', fut-elle exemplaire ? A-t-elle des leçons à donner ?

Une fois l’Empire colonial effondré, que devient la petite île ? Veut-elle s’en retourner à son passé glorieux mais confisqué et veut-elle enfler ses mythes pour les vendre à l'encan ?


Les mythes se portent bien, ils se sont même diffusés partout. Faut-il en rester là et faire du chantage à la Dette ? Ou bien, au contraire, est-il possible que l'île envisage de sortir du mythe et arrive à affronter la réalité du monde moderne ?


Pour approfondir un peu...

Mystères de la démographie

Combien de corsophones ?

Cartographie des révoltes

La taxation des échanges

La question des pertes de la guerre de 14-18

Un sort différent fait aux Corses pendant la Der des Der ?

La question foncière

Quelques sources

La convention de Philadelphie | quelques données sur les îles | la question sarde | le tableau des expatriations nettes | la constitution de 1735 | alphabétisation des conscrits 1878 | mobilisables 1911/-1921 |

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pour les pressés !!

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