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Les
mythes se portent bien, ils se sont même diffusés
partout. Faut-il en
rester là et faire du chantage à la Dette ? Ou
bien, au contraire,
est-il possible que l'île envisage de sortir du mythe et arrive à affronter la
réalité du monde moderne ?
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Sortir
du dernier mythe
Vous l’avez compris, la question de la nation corse et son
droit à l’indépendance ne peut
être posée validement en termes de dette
historique. La mythologie du rapport de l’homme à
la terre jointe à un discours
récurrent sur l’appartenance
« naturelle » à une
aire culturelle
relève au mieux de la construction intellectuelle au pire de
l’illusion qui
masque un mal être dont les racines sont contemporaines, que
ce soit à titre
individuel ou au plan d’une population entière. De
la même manière, on a pu
constater la fragilité de la notion de
spécificité, comme s’il y avait des
populations plus spécifiques que d’autres. Il est
vrai, en revanche, que la
spécificité peut sembler être plus
discernable lorsqu’elle peut s’appuyer sur
des circonstances géographiques marquées comme
l’insularité, la montagne ou la
proximité d’une frontière
d’Etat. Cette spécificité est parfois
confondue avec
un marquage culturel fort, que ce soit en raison de la langue ou de la
religion, mais en réalité elle se confond le plus
souvent avec un développement
économique en décalage, je renvoie, à
ce propos, aux détails soulignant le
caractère encore sauvage ou préservé,
c’est selon, de la population et de la
nature corse dans les récits des voyageurs et ce
jusqu’au second conflit
mondial. La spécificité est donc une notion
fluctuante qui renvoie les
populations supposées moins marquées à
une sorte de no man’s land de
l’identité : il faudrait ainsi tenir pour
allant de soi que les berrichons
ne sont donc pas spécifiques et les flamands le sont moins
que les alsaciens…
Le
discours corsiste s’installe dans cette ornière et
plus
particulièrement dans l’image d’une
société agro-pastorale que le
développement
de la fonction publique est venue perturber. Si
l’historicité de la
transformation des activités de la
société corse est indéniable, il
n’en reste
pas moins que l’image actuelle de la
société corse en sort
déformée. La Corse a
fait l’impasse de la phase d’industrialisation qui
a avorté. Les raisons en
sont entremêlées entre une
responsabilité de l’Etat coupable
d’avoir grossi l’offre
d’emplois publics ce qui rend l’aventure
industrielle peu tentante (le
tertiaire a cannibalisé le secteur secondaire en plein
décollage industriel) et
des causes naturelles qui ne peuvent être ignorées
(faibles ressources et exploitation
peu rentable). A cela se greffent les évolutions techniques
qui ne permettent
pas la poursuite de certains modes de production, notamment dans la
sidérurgie,
avec l’emploi de combustible fossile plus efficace mais
quasi-inexistant sur
l’île. Citons enfin
l’amélioration et la sécurisation des
transports qui rend
moins essentielle la poursuite d’une économie de
subsistance. Par ailleurs, le
développement du secteur tertiaire associé au
repli post-colonial entraîne le
repli des activités traditionnelles et l’exode
rural vers le Continent mais
aussi vers le littoral. De la sorte, l’île est
restée à la marge des
bouleversements économiques des cent cinquante
dernières années et a gardé un
aspect de conservatoire agro-pastoral sur lequel vient se greffer des
modes de
vie calqués sur les modes de vie du Continent. Ainsi les
revenus minima assurés
par les transferts de toute nature et la multiplication des emplois
dans le
secteur public qui représente 35 % des emplois,
après un pic de 41% dans les
années 1990-2000, ont permis à la population
insulaire d’avoir accès aux
standards de consommation continentaux. La
société de consommation a rattrapé
le berger !
Pour
bien comprendre la singularité de la situation
économique et sociale corse
d’aujourd’hui, il est nécessaire de
garder présent
à l’esprit que la réputation
agro-pastorale de l’île n’est plus
qu’un souvenir.
Ainsi, quand le monde rural a un poids équivalent dans
l’île et sur le
Continent (3,6 % de la population active contre 3,8 % pour la moyenne
nationale
au premier trimestre 2006), il ne s’en suit pas que
l’origine des revenus et le
mode de vie soit en adéquation. En effet, les exploitants et
les éleveurs
subsistant dans l’intérieur de
l’île tirent une part non négligeable de
leurs
ressources des aides ou
d’activités
complémentaires (comme l’alimentaire
« identitaire » ou le tourisme
rural) tandis que les gros exploitants des plaines connaissent un mode
de vie
sociologiquement plus lié à l’univers
de la bourgeoisie citadine qu’au mode de
vie proprement rural.
La
Corse présente aussi une répartition de la valeur
ajoutée
très typée, où l’agriculture
ne représente que 2% du PIB et le tertiaire dans
son ensemble 83 % ! Lorsqu’on sait que plus
de la moitié de l’activité
du secteur secondaire relève d’entreprises du BTP,
on mesure combien l’île est
passée à côté du
développement industriel. L’agriculture
elle-même revêt un
caractère mixte, alliant des exploitations extensives
d’élevage à une
agriculture intensive et modernisée dans les plaines sans
que cela améliore
notablement la rentabilité (taille insuffisante, manque de
fourrages,
insularité) et qui se heurte à la plaie de
l’indivision. La moyenne d’âge
élevé
des exploitants (caractéristique que
l’île partage avec d’autres
régions du
continent) est un facteur aggravé par un surendettement plus
important ici
qu’ailleurs (l’encours de la dette
représente 124 % du chiffre d’affaire
contre 87 % en moyenne nationale).
Malgré
cette image particulièrement tenace
d’économie agricole,
la Corse au travers de cette distorsion d’activité
présente, en réalité,
l’image d’une île urbaine. Bien évidemment, il
ne s’agit nullement de qualifier d’urbaine la
destination
des surfaces foncières, et l’île de ce
point de vue ne ressemble pas à Malte,
mais bien à la proportion inattendue de la populationurbaine
(63 %). L’absence de secteur industriel et
l’omniprésence du tertiaire,
à fortiori public, ont empêché
qu’en Corse
s’opère la stratification de la
société en classes sociales aux
intérêts
économiques antagonistes. Seules
subsistent les anciennes structures de parenté ou de
clientélisme typiques des
sociétés industrielles au sein d’une
société envahie par la classe moyenne. La
continuation de ces solidarités qui non seulement traversent
les
professions,
les secteurs, mais touchent les appartenances politiques
qu’elles
soient
d’obédience corsiste ou non, empêche
aujourd’hui comme au temps de Paoli toute
démarche et encore moins toute action tendant à
penser un
Etat corse. Qu’on ne
s’y trompe pas : le clan corsiste, autant que les
autres,
refuse l’Etat
français ou… corse, car le citoyen
n’émerge
pas comme catégorie de la société
corse, société tout entière
étrangère à la rationalité
économique et, à
l’inverse, déterminée par les liens
familiaux ou
les intérêts particuliers.
Jusqu’à
présent, l’approche de la dimension
économique du
développement de l’île se contente
d’aligner les constats et diverge encore
sensiblement sur l’analyse des causes, des freins au
développement. Ainsi la
question de l’insularité elle-même
fait-elle débat de même celle de la taille
ou de l’accessibilité du marché.
L’autocentrage de l’économie corse est
patent : plus de la moitié de la
création de valeur ajoutée est
d’origine
externe (fonds publics nationaux ou européens, tourisme,
gros équipement), le
rayonnement de ses ressources en hommes est faible,
et
alors quoi ! Que dire au-delà ? Si
quelques spécialistes se penchent
sur la question, il n’existe pas de relais de la
réflexion sur la place
publique. En l’absence d’une véritable
réflexion économique sur le devenir de
l’île,
la
population est tiraillée entre deux
pôles de sensibilité.
L’un de ces pôles accepte une certaine perte
d’identité sans toutefois s’interroger
réellement sur le contenu de cette
identité au profit des effets
bénéfiques de l’intégration
dans le grand
ensemble français, car, après tout le
gîte et le couvert étaient assurés et
si
la modernisation des équipements de
l’île a connu des hauts et des bas, la
Corse connaît aujourd’hui un rattrapage certain. En
revanche, cette sensibilité
a l’œil rivé sur les bienfaits
matériels immédiatement perceptibles mais
néglige l’affect relatif à la
perception que les Corses peuvent avoir de leur
passé. L’autre sensibilité,
d’un bord diamétralement opposé, joue
sa partition
sur le mode de la perte d’identité, et pour ce
faire, reconstruit en grande
partie une identité mythique. Sur l’analyse des
effets de l’intégration dans un
plus vaste ensemble, les corsistes vont insister sur les effets
négatifs, comme
la régression de l’activité
économique dans l’île
jusqu’aux années 1960, la
désertification des pièves de montagne, la
disparition de la langue, tout en
refusant de retenir l’aspect positif de
l’élévation du niveau de vie, de
l’ouverture au monde et même, par le
passé, d’un sort unique fait à une
province pourvue en emplois publics à
l’extérieur de l’île. Pourtant
les
positions ne sont pas toujours définitivement
arrêtées et l’on peut assister
à
des débats à position renversées entre
ceux qui, attachés à la tradition
corsiste, n’imaginent nullement que les avantages
matériels de l’insertion dans
l’espace français soit remis en question, et ceux
qui redécouvrent leur
corsitude lorsque les règles de la république
deviennent dérangeantes. Cette
ambiguïté des attitudes risque de demeurer
longtemps tant qu’on n’aura pas
exploré le réalisme de la synthèse des
options ou du choix de l’une ou l’autre.
Pour ce faire, il faut aux Corses le courage de se
détourner des légendes et
des regrets pour poser la question en ces termes : comment
rééquilibrer la
société corse et son développement
économique et social ? La réponse
institutionnelle doit venir en dernier comme une conclusion logique et
non
comme une condition de l’exercice.
Faiblesses et atouts
dans l’ensemble français
Les faiblesses structurelles de l’île dans le
secteur
agricole se doublent de limites inhérentes à la
dimension et à l’insularité
ainsi qu’à l’histoire. Le tissu des
entreprises est très peu dense, la presque
totalité des entreprises employant moins de dix
salariés et la moitié est
constituée d’entrepreneurs individuels. Le secteur
industriel est quasi
inexistant, en raison de l’absence de ressources naturelles
ou de leur coût
d’exploitation trop élevé pour un
développement économique centré sur le
marché
intérieur. L’accent est dès lors
souvent mis sur le handicap de l’étroitesse du
marché et sur celui de l’insularité.
Ainsi, pour pouvoir vendre ses produits et
atteindre le seuil de rentabilité, la Corse doit trouver des
débouchés à
l’extérieur de l’île. Dans
l’ensemble français, cela revient à
chercher des
débouchés sur le Continent, or malgré
la dotation de continuité territoriale
les coûts de transports grèvent la
compétitivité des entreprises. En revanche,
s’agissant de débouchés qui ne sont pas
des exportations les produits
bénéficient d’une libre circulation.
Dans un contexte européen l’avantage
relatif du marché intérieur français
est négligeable ; il n’en est pas de
même pour des exportations hors du marché unique.
Cependant,
cette analyse est contestable, le statut d’île
n’est pas toujours un handicap insurmontable et
l’on peut citer des îles
dynamiques, entièrement tournées vers le commerce
international, qu’il s’agisse
d’île-cité comme Hong Kong ou
d’île-Nation comme le Royaume-Uni. Tout
d’abord,
la faiblesse du marché intérieur n’est
pas compensée par les échanges car
l’intégration dans l’ensemble
français a fait dériver le centre
économique
référent de l’île depuis
l’Italie du Nord vers le Nord de l’Europe,
où les
perspectives de débouchés sont
handicapées par le surcoût de transport qui
devient plus important.
Enfin, le cycle vertueux des externalités semble devoir
être contraint moins
par l’insularité que par
l’étroitesse de l’offre
intérieure. En effet, si la
dynamique de regroupement des capacités
d’innovation, d’augmentation de la
qualité, de diversification, décroît
avec la distance (ainsi des petits pôles
d’excellence peuvent produire des effets positifs locaux, ce
qui permettrait en
théorie, à une île de petite taille
d’en bénéficier), encore faut-il que
cette
offre de qualité trouve un débouché,
et ici la taille de l’île se mesure moins
à sa superficie qu’à sa
démographie.
Cependant,
ces faiblesses ne sont pas rédhibitoires si l’on
considère les évolutions les plus
récentes,
où
force est de constater que la situation économique va mieux,
et va dans le sens
d’un rééquilibrage des
activités. Premier indicateur, le marché du
travail est
en amélioration constante depuis près de dix ans.
En 1997, le taux de chômage
s’établit à 16,2 % de la
population active contre 12,2 % en moyenne
nationale, soit un différentiel de 4 points. Cette
différence tombe à 1,4 point
fin 2002, pour devenir négligeable à la mi-2006,
ave un taux de chômage ramené
à la moyenne nationale ou peu s’en faut
(10,5 % contre 10,1 %). C’est
un signe manifeste de rattrapage en raison d’un fort
accroissement de l’emploi
(+16 % contre +10 % au plan national). Le taux de création
d’entreprises est
supérieur à la moyenne nationale depuis 2002,
tandis que l’effort d’investissement
reste soutenu dans le secteur industriel hors BTP (lequel
connaît une pause
ainsi que le commerce de gros et le tourisme). Cette embellie des
investissements profite surtout aux biens intermédiaires et
à
l’agro-alimentaire. Pour l’heure, on constate une
progression très favorable du
PIB corse selon une tendance moyenne de 2,2 % annuel en valeur
constante
depuis dix ans.
|
1994
|
1995
|
1996
|
1997
|
1998
|
1999
|
2000
|
2001
|
2002
|
2003
|
Corse
|
0,2%
|
-1,4%
|
-1,6%
|
5%
|
4,2%
|
5,1%
|
4,1%
|
4,3%
|
0,1%
|
2,4%
|
Métropole
|
2,1%
|
2,3%
|
1,1%
|
2,3%
|
3,6%
|
3,3%
|
4,1%
|
2%
|
1,3%
|
0,8%
|
Source : site
www.insee.fr/fr/ffc/docs_ffc/PIB_VA_region.htm
L’île
se situe toujours au dernier rang des régions
métropolitaines en terme de PIB par habitant mais son niveau
est quasiment
identique à celui du Languedoc Roussillon, du Nord Pas de
Calais ou de la
Picardie. Enfin, il se situe à 12 %
en-deçà de la moyenne de la Province et 22
% en-deçà de la France compte tenu du cas
particulier de l’Ile de France. Ce
chiffre doit être remis en perspective : il
s’agit d’un différentiel de 22
% par rapport à l’un des pays les plus riche du
monde (à titre de comparaison
les DOM ont un niveau de PIB par tête égal
à la moitié de la moyenne
nationale). En termes de richesse créée par
habitant (PIB/emplois), en 2003, la
Corse devance six régions métropolitaines. Ce dynamisme de la
dernière décennie est, certes, dû
encore trop fortement
au poids du tourisme et du BTP qui lui est fortement lié,
mais des
frémissements de diversification se font sentir. Enfin,
notons que si l’on
compare la Corse aux îles de l’Union
européenne, elle se situe dans un rang
fort honorable (6è sur 18 hors DOM, la Sardaigne est en
11è position, la Crète
en 12è et la Sicile en 14è position).
Le
fait le plus notable est la tendance récente de
l’économie corse à tenter de
s’arracher à la tentation du triptyque
tourisme/BTP/secteur public dont on sait 1°) qu’ils
interagissent l’un avec
l’autre et créent une bulle économique
et financière artificielle, et très
fragile puisque reposant sur la fréquentation touristique et
le dynamisme des
commandes publiques, quand bien même les instruments de
motivation ne manquent
pas dans l’île… et 2°)
qu’ils constituent un lieu privilégié
de mélange des
genres et favorisent les circuits douteux de financement.
Ainsi, le secteur des Nouvelles Technologies de
l’Information, le secteur de
l’audiovisuel (20 M€ de chiffre
d’affaire), voire le secteur aéronautique, sont
des secteurs dont les perspectives de développement sont
encourageantes mais,
plus significatif, le poids grandissant des industries
agro-alimentaires et des
biens intermédiaires dans l’effort
d’investissement se présente comme un
rendez-vous pris pour les années à venir, dans un
secteur qui, jusqu’à présent
a peu augmenté sa présence dans la
création de valeur (8 % des valeurs ajoutées
industrielles en 2003 comme en… 1993). A suivre donc. La
situation de la Corse,
ces dernières années tend à faire
mentir les rapports de l’Union européenne qui
relevaient qu’en
« matière de PIB,
mais aussi d'emplois ou de répartition
démographique, la situation globale de
l'ensemble des régions insulaires a tendance à
stagner, voire pour certaines à
se détériorer, sous l'effet de
paramètres aussi variés que l'environnement
macro-économique européen, mais aussi, de
mauvaises saisons touristiques, une
situation agricole plus concurrentielle ».
En
revanche, la fragilité induite par les
spécialisations qui sont issues de la
dépendance structurelle vis-à-vis du secteur
public est patente dès lors que
les périodes de vaches maigres perdurent. Ainsi, la
réduction des dépenses
publiques, les déséquilibres
démographiques (jeunes/vieux) ou géographiques
entre les zones littorales exploitables et
l’intérieur, souvent montagneux et
dépeuplé, constituent des handicaps
sérieux pour une région qui a dû penser
sa
mutation postindustrielle sans avoir connu d’étape
intermédiaire.
L’intégration
dans l’ensemble français avait fait passer
l’île d’un état
d’autosuffisance d’une population essentiellement
pauvre à un
état artificiel d’abondance par le moyen de
transferts financiers importants et
d’emplois publics assurés sur le Continent ou dans
les colonies, puis dans les
années soixante-dix par la multiplication artificielle
d’emplois publics au
travers du dédoublement des instances administratives au
motif de répondre… à
la question corse ! Le prix à payer est, bien
sûr, une spécialisation
déséquilibrée avec un secteur public
écrasant et un secteur privé
réfugié dans
les activités qui échappent à la
logique concurrentielle : le tourisme et
le BTP, le tourisme parce qu’un hôtel en Corse ne
peut être concurrencé que par
un autre hôtel en Corse, le BTP parce que la branche est
traditionnellement
fermée à la concurrence, peu
d’entrepreneurs extérieurs viennent ouvrir des
chantiers en Corse, mais surtout parce qu’il s’agit
d’une activité très
fortement dépendante de la commande publique, au moins en ce
qui concerne la
partie Travaux Publics. Cette spécialisation est le
résultat de l’Histoire et,
à moins de vouloir revenir à une
économie de subsistance, il faut se contenter
de noter le fait, et d’explorer les voies et moyens de penser
le développement
de l’île autrement.
Les risques et les
chances du grand large
Jusqu’à présent peu de voix se sont
élevées pour proposer
une vision économique et sociétale
cohérente d’une Corse assumant
jusqu’à la
dernière extrémité sa vocation
d’île. Néanmoins, il existe un discours
de
rupture de la dépendance qui se veut fondateur en refusant
le statut d’économie
assistée. Nous ne parlerons pas ici des initiatives
privées recourant à des
financements sur lesquels beaucoup a été dit mais
des pistes de développement
esquissées dans les discours, les sites de
l’internet ou les articles, jamais
d’ailleurs dans le cadre d’analyses au long cours,
fouillées, documentées,
publiées. Le thème souvent rebattu est celui de
la synthèse entre la vocation
agro-pastorale ancestrale et le plongeon dans la modernité.
Du grand écart
historique certains envisagent de faire l’atout principal de
l’île, à la
condition bien sûr, de se débarrasser des
facilités de l’aide étatique, sans
pourtant la refuser totalement : dans une
négociation sur l’indépendance
de l’île, solder la dette
de l’Etat
colonial en constituerait probablement le nœud
gordien.
L’analyse
séparatiste se cantonne dès lors au registre de
l’utopie
en proposant comme voie possible l’articulation des
contraires, à savoir le
mythe du grand bond en avant, parfois en reproduisant les
schémas des
conglomérats chinois ou de certains pays du tiers-monde dont
on sait les
résultats désastreux, mythe associé
à un autre mythe, celui de la permanence
des valeurs et des activités, le retour aux sources, la
recherche de
l’authentique. C’est un dernier avatar de la
synthèse entre modernité synonyme
de richesse et la tradition garante des racines fondatrices de
l’identité,
comme si l’identité se construisait uniquement sur
un lointain passé. Or on
oublie souvent que des nations pionnières, ne disposant
d’aucun ancrage
historique, peuvent
présenter elles
aussi une identité, les Etats-Unis en tête dont
l’identité est suffisamment
forte pour imposer ses modes de penser à la
planète, non sans conflit. La Corse
ne pourrait-elle pas envisager une démarche
pionnière, mais cela suppose que
les Corses sont suffisamment fiers d’eux-mêmes pour
croire qu’ils ont un modèle
à proposer.
Une variante plus modernisée de ce discours laisse
de côté les références
tiers-mondiste, datées et peu exemplaires, pour
évoquer, à l’emporte-pièce,
les
économies développées qui semblent
avoir conservé des traces de tradition sans
mesurer toutefois les efforts d’adaptation de ces
économies et les sacrifices
qu’elles ont dus consentir. Si d’aucuns
évoquent les exemples du Japon, de
Singapour, ou de Malte, je les invite à se pencher sur les
photographies de la
fin du XIXè siècles ou sur les récits
des voyageurs pour constater combien la
tradition dut céder à la modernité.
Néanmoins ce discours a fini par imprégner
les débats sur l’avenir de
l’île, avec cependant une attention
portée aux
technologies de pointe, mieux en phase avec les mutations
technologiques et organisationnelles
des sociétés postindustrielles. Il peut
paraître plus aisé d’opérer
une
synthèse qui ne met pas en péril
l’environnement naturel et l’équilibre
sociétal, en réalité, les industries
de pointe ici visées ne sont viables
qu’à
l’aide de transferts financiers massifs, et lorsque la greffe
prend, cela ne
préserve pas plus les activités traditionnelles
que l’industrie lourde. En
outre, renvoyer toute la responsabilité sur l’Etat
c’est se défausser de ses
responsabilités, c’est refuser de penser autrement
qu’à l’aide de schémas
d’emprunt inadaptés au lieu de construire une
réflexion originale sur le sujet,
débarrassée des visées
institutionnelles, lesquelles devront être
conséquence
et non cause de la réflexion sur l’avenir de
l’île.
La
structure d’activités de l’île
l’arrime à un schéma de
domination de l’offre de biens collectifs ou de biens non
échangeables, schéma caractéristique
des économies développées mais qui, en
Corse, fait l’impasse du décollage
industriel. Cette situation pousse les salaires à la hausse
et freine, par
conséquent, tout effort de productivité sur le
marché des biens à faible valeur
ajoutée. Compte tenu de la persistance des aides, et donc de
la rigidité des
coûts salariaux, il est peu probable qu’un
modèle de développement fondé sur la
production de biens courants puisse être viable,
d’autant que pèse sur
l’économie corse le coût du transport
interne, l’éloignement et
l’étroitesse du
marché. Aussi, les voies de développement
autonome doivent être recherchées
dans la production de biens à forte valeur
ajoutée, non pondéreux, voire
indifférents aux coûts logistiques. Dans cette
optique, posons les trois
questions essentielles de la place du marché
intérieur, de l’atout de
l’insularité dans le cadre d’une
économie tirée par les échanges et des
conditions de réussite d’un tissu
d’activités productrices
d’externalités.
La question de la taille du
marché
intérieur se réduit à la question
de la
taille optimale du marché pour une entreprise
donnée dans
des conditions de
rentabilité suffisante. Il faut pour cela que
l’entreprise
ait l’assurance d’un
débouché minimum. Cela étant, la
notion de taille
dépend aussi du secteur et
plus spécifiquement du type de produit incorporant ou non
une
part importante
de valeur créée ou bien encore d’un
positionnement
original du produit :
ainsi une bière comme la Pétra peut trouver son
marché en Corse (et même à
l’extérieur) aussi bien qu’un produit
électronique sophistiqué. Enfin, rien
n’interdit à une économie
donnée
d’élargir son potentiel de marché par
l’exportation. C’est surtout sur ce dernier point
que la
Corse a des
difficultés en raison du poids des biens non
échangeables
(logement, biens
collectifs, réparation automobile, etc…) qui ne
peuvent
être vecteur de
conquête de marchés extérieurs, mais,
d’un
autre côté, ce secteur est plutôt
à
l’abri de la concurrence extérieure.
N’était
cette question du poids du secteur
des biens non échangeables, dans l’absolu, tout
serait
ouvert pour la Corse,
d’autant qu’il n’y aucun lien entre la
taille et le
développement (voyez Malte,
Hong Kong, Singapour, etc.). En revanche,
l’éloignement
des marchés extérieurs
n’est un inconvénient que si la taille
démographique du marché interne est
faible. Le développement de la Corse n’est donc
contraint
par son faible marché
interne que dans la mesure où les entreprises insulaires
sont
pénalisées par
l’éloignement, et dans la mesure où le
secteur
concerné incorporerait une forte
proportion de coûts de transport.
Il reste une deuxième
hypothèque à lever, le
coût induit de l’insularité pesant sur
les approvisionnements et sur les
exportations et qui croît avec le degré de
périphéricité.
La question semble entendue, toutefois, il existe une marge de
manœuvre
invisible pour l’île. Avant d’aller plus
loin, gardons à l’esprit que les
marchandises sont échangées par voie maritime
laquelle est meilleur marché que
les autres modes de transport.
Enfin,
si une île est entourée
d’eau… elle a aussi
l’insigne avantage de n’être pas
enclavée ou tributaire de ses voisins
immédiats. En d’autres termes, une île
est plus libre de ses choix de
partenariat commercial qu’un pays continental. On a vu plus
haut que la cible
des échanges de la Corse avec le Continent n’est
pas nécessairement le Nord de
la France ou de l’Europe, son éloignement relatif
étant particulièrement
pénalisant puisque il augmente la part terrestre du
transport. En conséquence,
il serait de bonne politique que les entreprises corses se tournent
plutôt vers
les zones qui maximisent la part de transport maritime.
Précisément, les zones
immédiatement accessibles (Sud de la France et Italie du
Nord) appartiennent
précisément à la zone la plus
développée du bassin
méditerranéen mais qui se
trouve aussi en connexion avec la partie sud de l’arc Rhin-Rhône-Plaine
du Pô. Il n’y a cependant pas de
fatalité à devoir écouler ses produits
au nord de l’Europe alors que la Corse
est tout simplement l’île qui minimise la distance
vis-à-vis des côtes
françaises et italiennes et est donc, de ce fait, en
meilleure position
géographique et logistique que la Sardaigne, les
Baléares, Malte ou la
Sicile.
De
même les produits exportables ne sont pas
nécessairement tous
sensibles au coût de transport. Au plan international, il
semble que la part du
coût de transport baisse régulièrement
en
raison de progrès dans les organisations logistiques
(palettisation, flux
tendus, conditionnements normés, augmentation du tonnage des
cargos) mais aussi
dans le développement de secteurs aux produits peu
pondéreux mais à fort
contenu de valeur. Enfin, la
compétitivité peut être
renforcée par des éléments positifs de
différentiation des produits, comme
l’effort sur la qualité, l’innovation
technologique, ou encore plus simplement
le développement de services à distances, ou des
nouvelles technologie de la
communication. En bref, dans un monde où une part croissante
du PIB est le fait
de biens dématérialisés,
l’insularité n’est plus un obstacle
insurmontable, les
seules externalités envisageables, pour le coup, se rient des
distances, et la Corse
pourrait viser des débouchés au-delà
de la Méditerranée occidentale.
Pour finir
l’insularité ne freine-t-elle pas
la capacité de l’économie locale
à créer des moteurs de développement
dans la
mesure où si les marchandises peuvent embarquer ou
être débarquées facilement,
en revanche, la circulation des personnes est
gênée ?
Dans la plupart des cas, on observe que les externalités
jouent surtout au niveau de l’agglomération et au
sein d’une activité ; il
n’y a aucune raison de penser qu’il en serait
différemment dans le cas de la
Corse, où les quelques pôles urbains pourraient
développer un centre d’excellence, comme on dit
aujourd’hui. Le débat est loin
d’être tranché. Par ailleurs, quel que
soit le
niveau de recherche-développement pratiqué dans
une région donnée, et même en
quasi auto-suffisance, les échanges
d’expérience, de données,
l’ouverture
négociée de brevets, etc. existent et font
souvent la différence, or cet impact
est sensible à l’éloignement
(mobilité des cerveaux). Auquel cas,
l’insularité
est ici pénalisante d’autant qu’elle ne
permet pas à la région en question de
bénéficier en totalité des apports du
maillage national d’information, alors
même que celui-ci est partie prenante des
capacités entrepreneuriales de l’île.
Concrètement, les entreprises de Corse
entretiennent un réseau de
relations fortes avec le Continent tels les liens commerciaux,
institutionnels, bancaires, mais avec un coût de
l’information plus élevé que
pour une région continentale.
Le
défi est là : une Corse
détachée
d’un ensemble
national peut-elle tabler sur une
capacité de développement
limitée à deux ou trois petites agglomérations ? Ce
développement autocentré
est-il suffisant pour être un socle
d’échanges
internationaux, source attendue
d’enrichissement ? La « nouvelle
économie » permet-elle de faire
bénéficier à la Corse
d’externalités
qui se joueraient de la géographie et,
sautant le stade du développement local, pourrait grandir
à une échelle
trans-nationale ? Faut-il croire que l’espace
européen et le développement
des rencontres institutionnelles interrégionale
constitueront un
réseau
d’échange d’information pouvant
suppléer
à la sortie de la Corse de l’ensemble
français ? Il n’existe malheureusement
pas
aujourd’hui d’études, de
monographie encore moins de modèles pouvant apporter un
début de réponse :
si les cheminements d’une Corse prenant le large sont
théoriquement possibles,
ils sont peu connus et encore moins mesurés sans a priori.
Le
débat semble
statique, bloqué entre deux positions. L’une est
fataliste
et tient qu’une île
reste une île et les Corses
d’indécrottables
fonctionnaires éloignés de toute
idée d’aventure. La situation actuelle de la Corse
est au
fond confortable,
après tout l’île n’est pas si
mal lotie, et
les revenus et les pensions sont
assurés. Cette vision ne peut que conforter
l’île
dans ses vieux démons et de
développement, il n’y en aurait point parce que,
c’est bien connu, il ne peut y
en avoir. L’autre est romantique et tournée vers
la
passé ; nous avons
suffisamment insisté là-dessus, elle tient que
tout le
malheur vient de ce que
l’île est liée à la France
et, la
responsabilité des Corses n’étant pas
posée,
la réflexion se cantonne au volet institutionnel.
Assumer les risques du
grand large
Ce qui est en cause dans le cas de l’hypothèse du
grand
large est de savoir dans quelle mesure
l’indépendance est une réponse
adéquate
aux projets économiques et sociaux que l’on peut
faire pour l’avenir de l’île.
L’aisance croissante de la population de
l’île, indéniable lorsqu’on
joint le
taux d’équipement des ménages
à l’amélioration de l’emploi,
ou lorsqu’on
considère le niveau du PIB par habitant ou le revenu par
tête,
est
liée à son intégration dans un
réseau solidaire, au sein de l’espace
français
voire européen.
Envisager une
renaissance économique en gardant une logique
d’économie subventionnée est
inadéquat en raison de l’effet
d’éviction vers le secteur public et celui des
biens non échangeables. C’est donc une
réflexion sur la sortie de la convergence
économique territoriale qu’il faut mener tout en
évaluant les moyens d’une
protection évolutive et différentiée
des activités naissantes dans les secteurs
concurrentiels. Bien entendu, la donne doit être claire, tout
effort sur le
développement d’activités nouvelles se
traduit par un renoncement au confort
douillet des secteurs protégés, ce qui signifie
qu’il faudra sans doute
accepter une baisse du niveau de vie dans un premier temps. Quant
à savoir
quelle pourrait être les modes de financement, le
débat doit avoir lieu entre
d’une part la formule du semi-public qui a
l’avantage d’être
déjà pratiquée et
de permettre l’implication de la collectivité
territoriale et, d’autre part, la
solution de l’appel à
l’épargne abondante mais mal orientée
et aux
investisseurs prêts à investir en Corse.
L’insertion
de la Corse dans un nouvel ensemble
méditerranéen puis européen selon
l’indifférence de tel ou tel secteur aux
coûts de transport doit être pensée
comme une relation île/continent. Une
recherche de synergie d’île à
île est probablement une fausse bonne idée. Les
marchés des autres îles sont trop
étroits et déjà
concurrencés pour permettre à
une offre émergente d’origine corse de
s’imposer, alors que des débouchés plus
grands existent dans les grandes régions du Sud de la France
et du Nord de
l’Italie. Pour prendre une image, et sans même
faire appel au concept de niche
technologique, une bière à la châtaigne
se vend aussi bien sinon mieux à Paris
qu’à Cagliari. Enfin, la fascination
exercée par la Sardaigne ou la Sicile ne
doit pas conduire à suivre des modèles dont on
n’a pas encore exploré toutes
les facettes, et alors mêmes que les indicateurs
comparés de ces trois îles
tournent à l’avantage de la Corse, même
si l’importance du secteur protégé agit
comme un analgésique, voyez plutôt :
|
Taux de chômage longue
durée
|
PIB/habitant
UE = 100
|
Corse
|
6,3 %
|
82
|
Sardaigne
|
15,7 %
|
73
|
Sicile
|
16,9 %
|
66
|
Source : Eurostat/Eurisles
2000
Il
reste à évaluer sans fard les
difficultés de l’exercice
pour ce qui touche à la mobilisation des capitaux. La
disparition des contrôles
qu’une autonomie non maîtrisée peut
favoriser, risque de transformer les
circuits de financement en circuit de recyclage de l’argent
sale qui ne ferait
que transiter par l’île ou qui serait
dérivé vers le financement de projets
immobiliers et touristiques, ce qui revient à renforcer
encore plus le secteur
des biens non échangeables. Ce scénario
s’il venait à se vérifier rapprocherait
la situation de l’île de celle prévalant
dans les paradis fiscaux ou les
« casinos flottants ». Ce serait
accepter une dégradation du niveau
de vie au profit de quelques uns et de toute manière
accepter une perte
d’identité.
Pour
conclure, il est inutile et contre-productif de se
focaliser sur le passé à la recherche
d’un dû. Il n’est pas vraiment
admissible, notamment, de relier la stagnation de
l’économie corse à
l’intégration économique à la France,
sans autre précaution. On a vu à quel point les
Corses étaient peu attirés par la mer et
n’ont donc pas vraiment manqué un
rendez-vous avec elle. Dire que la Corse aurait pu avoir un
destin à l’anglaise est un point de
vue non historique. En revanche, les Corses ont toujours agi en
fonction des
Puissances qui les entouraient, les seigneurs insulaires jouant
d’une alliance
contre l’autre afin d’y obtenir avantages et
privilèges. Des deux vocations,
commerciale ou mercenaire, la seconde imprègne
l’histoire de l’île. Lorsque la France
annexe l’île, elle
ne fait que répondre à cette seconde vocation
mais en lui donnant une ampleur
inconnue jusqu’alors, puisque elle apporte emplois, honneurs,
intégration dans
l’appareil d’Etat au plus haut niveau, et ce
dès l’Ancien Régime.
L’île fournit
alors généraux, administrateurs, ministres,
préfets tout aussi bien que des
cohortes de fonctionnaires et de soldats. Alors, certes, pourquoi
travailler la
terre et conduire les troupeaux dans le cadre d’une
économie de subsistance
quand on vous offre des revenus, des honneurs et les moyens
d’entretenir un
niveau de vie meilleur ? Ce choix est bien celui des Corses,
aussi la
question du devenir économique de l’île
peut le remettre en cause en cherchant
à développer l’autre vocation, celle du
dynamisme commercial, mais, dans ce
cas, le choix institutionnel doit être une
résultante de la réflexion sur le
devenir économique de l’île et non son
cadre de référence.
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Conclusion ]
|
C’est
une histoire de mythes et d’identité : la question
corse
qui fait souvent l’actualité
a tordu la mémoire des faits. Le tout
grâce
à la
réécriture de l’Histoire de
l’île et à la mythologisation de
la langue
|
|
Allons
plus loin déshabillons le paon pour découvrir le
poulet qui est
dessous. La Corse fut-elle le phare des Lumières ? Y-a-t-il
eu une
Corse vraiment indépendante et que voulaient les Corses sous
Paoli ?
|
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La
Corse s’est ralliée. A-t-elle combattu ? La Corse
eut-elle un comportement
si différent des autres provinces de la
République française ? Le
ralliement fut-il facile ? A-t-elle cru se découvrir un
destin ?
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La
petite île a-t-elle voulu donner des gages ? S'est-elle
imaginé un
Empire par
procuration ? Lors de l'occup', fut-elle exemplaire ? A-t-elle des
leçons
à donner ?
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Une
fois l’Empire colonial effondré, que
devient la petite île ? Veut-elle s’en retourner
à son passé glorieux
mais confisqué et veut-elle enfler ses mythes pour les
vendre à l'encan ?
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Les
mythes se portent bien, ils se sont même diffusés
partout. Faut-il en
rester là et faire du chantage à la Dette ? Ou
bien, au contraire,
est-il possible que l'île envisage de sortir du mythe et arrive à affronter la
réalité du monde moderne ?
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